“Notre-Dame Que c'est beau !” Victor Hugo

La Cathédrale




La cathédrale Notre-Dame de Paris, communément appelée Notre-Dame, est la cathédrale de l'archidiocèse de Paris, située sur l'île de la Cité. Dédiée à la Vierge Marie, elle est pendant de nombreux siècles l'une des cathédrales les plus grandes d'Occident. Longtemps la plus haute construction de la ville, elle est l'un des monuments les plus emblématiques de Paris.

Commencée sous l'impulsion de l'évêque Maurice de Sully, sa construction s'étend sur plus de deux siècles, de 1163 au milieu du xive siècle. Après la Révolution française, la cathédrale bénéficie entre 1844 et 1864 d'une importante restauration, parfois controversée, sous la direction de l’architecte Viollet-le-Duc, qui y incorpore des éléments et des motifs inédits. Pour ces raisons, le style n’est pas d'une uniformité totale : la cathédrale possède des caractères du gothique primitif et du gothique rayonnant. Les deux rosaces, qui ornent chacun des bras du transept, sont parmi les plus grandes d’Europe.

Édifice à la fois religieux et patrimonial, elle est liée à de nombreux épisodes de l’histoire de France. Église paroissiale royale au Moyen Âge, elle accueille l’arrivée de la Sainte Couronne en 1239, puis le sacre de Napoléon Ier en 1804, le baptême du duc de Bordeaux en 1821, ainsi que les funérailles de plusieurs présidents de la République française (Adolphe Thiers, Sadi Carnot, Paul Doumer, Charles de Gaulle, Georges Pompidou, François Mitterrand). C'est aussi sous ses voûtes qu'est chanté un Magnificat lors de la libération de Paris, en 1944. Le 850e anniversaire de sa construction est célébré en 2013.



La cathédrale inspire de nombreuses œuvres artistiques, notamment le roman de Victor Hugo Notre-Dame de Paris paru en 1831 et qui influence en partie son histoire. Au début du XXie siècle, Notre-Dame est visitée chaque année par quelque 13 à 14 millions de personnes. L’édifice, aussi basilique mineure, est ainsi le monument le plus visité en Europe et l'un des plus visités au monde jusqu'en 2019.

Le 15 avril 2019, un violent incendie détruit la flèche et la totalité de la toiture couvrant la nef, le chœur et le transept. Il s'agit du plus important sinistre subi par la cathédrale depuis sa construction. La cathédrale est, depuis cette date, fermée au public pour une durée indéterminée.





Une tradition fait exister à l'emplacement de Notre-Dame, un temple païen gallo-romain dédié à Jupiter. Il s'agit d'un mythe historiographique reposant sur la découverte du célèbre pilier des Nautes en 1711, retrouvé sous la cathédrale, démonté et remployé dans les maçonneries du rempart gallo-romain entourant la Cité au Bas-Empire. Ce pilier, dédié effectivement à Jupiter entre 14 et 37 ap. J.-C., aurait pu se dresser n'importe où à Lutèce et être acheminé, comme bon nombre de blocs sculptés issus de monuments antiques, au IVe siècle, lors des travaux liés à la fortification de l'île, qui n'était alors que faiblement urbanisée.

Pas moins de quatre édifices religieux se succèdent avant la cathédrale de Maurice de Sully : une église paléochrétienne du ive siècle remaniée en une basilique mérovingienne, puis une cathédrale carolingienne3 et enfin une cathédrale romane restaurée et agrandie mais qui s'avère progressivement trop petite pour la population de Paris qui augmente rapidement.

Selon Jean Hubert, la cathédrale primitive dédiée à Notre-Dame forme, du vie au xiie siècle, avec la cathédrale Saint-Étienne une cathédrale double qui, accompagnée par le baptistère de Saint-Jean-le-Rond, constitue au Moyen Âge l'ecclésia du diocèse de Paris, le groupe épiscopal qui a précédé la cathédrale de l'évêque Maurice de Sully.

Marcel Aubert appuie la thèse de son élève en affirmant que l'église dont le mur occidental s'élevait à environ 40 mètres en avant de la façade actuelle est l'ancienne église mérovingienne de Saint-Étienne abandonnée à partir 857 et en ruines en 1112. La cathédrale primitive Notre-Dame est située plus à l'est, sur l'emplacement d'une partie de la nef, du transept et du chœur de la cathédrale actuelle. Son abside est préservée jusqu'à la construction du nouveau chœur en 1163, le culte se poursuivant dans sa nef pendant les travaux de la nouvelle cathédrale jusqu'en 1180.

Cette approche, au XXe siècle, de Jean Hubert et Marcel Aubert faisant de Saint-Étienne et Notre-Dame une cathédrale double, est cependant remise en question par les études récentes qui n'ont pas permis de confirmer les hypothèses avancées.




En 1160, l’évêque Maurice de Sully (initiative personnelle, des chanoines ou du roi Louis VII ?) décide la construction d’un sanctuaire d’un nouveau type beaucoup plus vaste à la place de la cathédrale romane démolie au fur et à mesure, les pierres sacrées étant parfois retaillées ou utilisées pour les fondations. Comme dans l’ensemble de l’Europe de l’Ouest, les XIe et XIIe siècles se caractérisent en effet par une rapide augmentation de la population des villes françaises, liée à un important développement économique, et les anciennes cathédrales étaient un peu partout devenues trop petites pour contenir les masses de plus en plus grandes de fidèles. Les spécialistes estiment que la population parisienne passe en quelques années de 25 000 habitants en 1180, début du règne de Philippe II Auguste, à 50 000 vers 1220, ce qui en fait la plus grande ville d’Europe, en dehors de l’Italie.

L’architecture de la nouvelle cathédrale doit s’inscrire dans la ligne du nouvel art gothique. Plusieurs grandes églises gothiques existent déjà à ce moment : l’abbatiale Saint-Denis, la cathédrale Notre-Dame de Noyon et la cathédrale Notre-Dame de Laon, tandis que la cathédrale Saint-Étienne de Sens est en voie d’achèvement. La construction, commencée sous le règne de Louis VII, qui offre la somme de 200 livres, dure de 1163 à 1345. À cette époque, Paris n’est qu’un évêché, suffragant de l’archevêque de Sens, Sens étant à l'origine la préfecture romaine de la Lyonnaise quatrième.

Première période (1163-1250)

La tradition incertaine rapportée par le chroniqueur Jean de Saint-Victor dans son Memoriale Historiarum, veut qu'entre le 24 mars et le 25 avril 1163, le pape Alexandre III alors réfugié à Sens, pose lui-même la première pierre en présence du roi Louis VII. En l'état actuel des connaissances, la date traditionnelle du début des travaux de Notre-Dame retenue est 116315. L’essentiel des travaux se fait sous la direction de l’évêque Maurice de Sully (1160-1197) et de son successeur Odon de Sully (1197-1208), ce dernier sans lien de parenté avec le premier. On distingue quatre campagnes d’édification correspondant à quatre maîtres d’œuvre différents dont les noms ne nous sont pas parvenus.


  • 1163-1182 : construction du chœur et de ses deux déambulatoires. Selon le chroniqueur Robert de Torigni, le chœur est achevé en 1177 et le maître-autel est consacré par le cardinal Henri de Château-Marçay, légat du pape et Maurice de Sully, le 19 mai 118216.
  • 1182-1190 : construction des quatre premières travées de la nef, des bas-côtés et des tribunes. La construction de la nef commença en 1182, après la consécration du chœur. Certains pensent même que les travaux débutèrent dès 1175. Les travaux s’arrêtèrent après la quatrième travée laissant la nef inachevée.
  • 1190-1225 : construction de la base de la façade et des deux dernières travées de la nef. On commença l’édification de la façade en 1208. À partir de cette année, les portails furent construits et décorés. L’étage de la rose date de 1220-1225. La construction des premières travées de la nef fut reprise en 1218 afin de contrebuter la façade.
  • vers 1225-1230 : selon Viollet-le-Duc, qui en trouve les traces dans le monument, un incendie aurait détruit à cette époque la charpente supérieure et les combles.
  • 1225-1250 : partie haute de la façade, et les deux tours. Agrandissement des fenêtres hautes (suppression des petites rosaces) pour remédier à l’obscurité (vers 1230). Simultanément la toiture des combles des tribunes est remplacée par des terrasses, et de nouveaux arcs-boutants, dotés de chaperons à chéneaux, permettent l’évacuation des eaux de pluie de la partie supérieure de l’édifice. On construit les chapelles latérales de la nef entre les culées des arcs-boutants. La tour sud est achevée en 1240 et l’on abandonne la même année l’idée de doter les tours d’une flèche. En 1250, fin de la construction de la tour nord. À cette date, la cathédrale est en fait terminée et totalement opérationnelle. Nous sommes en plein règne de Saint Louis. Les phases ultérieures de l’édification concernent des additions, embellissements, réparations et modifications parfois fort importantes.





Deuxième période (1250-moitié du XIVe siècle)

À cette époque, les portails du transept, construits en style roman, contrastent par la sévérité de leur style avec la grande façade gothique, richement ornée au goût du jour. La reconstruction des parties romanes est alors prestement décidée par l’évêque Renaud de Corbeil (1250-1268).

Jehan de Chelles, Pierre de Montreuil, Pierre de Chelles, Jean Ravy, Jean le Bouteiller et Raymond du Temple sont les maîtres d’œuvre qui se sont succédé durant cette période. Jean de Chelles procède à l’allongement du transept, au nord d’abord (vers 1250), puis au sud et fait réaliser la façade nord du transept et sa fameuse rosace. À la suite de sa mort en 1265, son travail sur le croisillon sud est terminé par Pierre de Montreuil, aussi à l'origine de la façade sud du transept et de sa rosace. Il meurt à son tour en 1267. Pierre de Montreuil achève également les chapelles et la porte rouge. De même, il commence le remplacement des arcs-boutants du chœur.

Son successeur Pierre de Chelles construit le jubé et commence les chapelles du chevet en 1296. Ces dernières sont achevées par Jean Ravy, qui est maître d’œuvre de 1318 à 1344. Jean Ravy commence la construction des admirables arcs-boutants du chœur d’une portée de 15 mètres. Il commence aussi la confection de la clôture du chœur. En 1344, son neveu Jean le Bouteiller lui succède et travaille jusqu’en 1363. Après son décès, son adjoint Raymond du Temple termine les travaux, notamment la clôture du chœur.

XVe et XVIe siècles

Les artistes de la Renaissance se détournèrent de l'art gothique considéré comme l'œuvre de barbares, aussi n'hésitèrent-ils pas à camoufler les piliers, recouvrir les murs et arcades d'immenses tapisseries et tentures. La statuaire baroque envahit les nefs chargées déjà de nombreux autels et pupitres, de tombeaux et cénotaphes.



XVIIe et XVIIIe siècles

En 1625 est construite la fontaine du Parvis Notre-Dame par l'architecte Augustin Guillain, elle est destinée à alimenter les habitants de l'Île de la Cité en eau courante. En 1699, selon le souhait de Louis XIV et le vœu de son père Louis XIII, on opéra de profondes transformations dans la décoration intérieure de la cathédrale, notamment au niveau du chœur. L’architecte Robert de Cotte démolit le jubé (qui fut remplacé par une somptueuse grille en fer forgé doré à la feuillure d’or), une partie des hauts-reliefs des clôtures afin d’ouvrir le chœur sur le déambulatoire en les remplaçant par des grilles, ainsi que des tombeaux pour permettre le réaménagement complet du chœur dans le goût de l’époque, à l’instar de bon nombre d'autres cathédrales gothiques dans toute l’Europe, au cours des XVIIe et XVIIIe siècles. De nouvelles stalles furent réalisées, ainsi qu’un nouveau maître-autel pour lequel furent confectionnées les statues qui l’ornent encore aujourd’hui, représentant Louis XIV renouvelant le vœu de son père Louis XIII, tous deux agenouillés devant la Pietà. En 1709, le chanoine Antoine de La Porte commanda au roi Louis XIV six tableaux illustrant la vie de la Vierge pour la décoration du chœur. Charles de La Fosse, réalisa pour ce projet en 1715, L'Adoration des mages, aujourd'hui conservé au Musée du Louvre.

En 1726, le cardinal de Noailles, archevêque de Paris, modifie l'architecture de la cathédrale, il en change « tous les profils », au niveau des pignons, roses et clochetons du côté sud. Il renforce les arcs-boutants, les galeries, les terrasses, et fait reconstruire la grande voûte de la travée qui menaçait de tomber en ruine. Il rénove la charpente et la toiture, dont il fait changer tous les plombs. Il fait remplacer les gargouilles par des tuyaux de plomb changeant l'évacuation d'eau des pluies. À l'intérieur, il fait supprimer l'ancien jubé médiéval et fait incruster de marbre blanc une chapelle pour sa famille.

En 1756, les chanoines jugeant l’édifice trop sombre demandèrent aux frères Le Vieil de détruire les vitraux du Moyen Âge et de les remplacer par du verre blanc ; après quoi on badigeonna les murs de la cathédrale. Les rosaces furent cependant conservées. Enfin, à la demande du clergé, Soufflot, architecte de l'église de Sainte-Geneviève, fit disparaître le trumeau et une partie du tympan du portail central, orné du célèbre Jugement Dernier, pour laisser passer plus aisément le dais des processions.



Sous la Révolution

La cathédrale, qui était propriété de l’archevêché de Paris, est mise à la disposition de la nation, comme l’ensemble des biens du clergé, le 2 novembre 1789. Depuis, l’État est resté propriétaire de la cathédrale.

En février 1791, par une suite de décrets de l'Assemblée constituante pris sur une proposition de la mairie de Paris, la cathédrale Notre-Dame de Paris devient le siège de la paroisse de la cité par transfert des prérogatives exercées jusqu'alors par 10 petites églises de l'île.

Au cours de la Révolution française, de nombreux actes de vandalisme visèrent la cathédrale : les rois de Juda de la galerie des Rois de la façade furent décapités et enlevés on croyait qu’il s’agissait des rois de France représentés pour exalter la monarchie capétienne. On a retrouvé 21 des 28 têtes originelles ainsi que de nombreux fragments en 1977, et ces têtes se trouvent actuellement au musée de Cluny. Toutes les grandes statues des portails furent également détruites, à l'exception de la Vierge du trumeau du portail du Cloître. Le Culte de la Raison fit son apparition à Notre-Dame de Paris le 10 novembre 1793, avec la fête de la Liberté ; par décret, la cathédrale devient un temple de la Raison. Ce culte fut organisé par Pierre-Gaspard Chaumette, et le maître-autel se vit ainsi transformé en autel de la déesse Raison. Fin novembre de cette année, le culte catholique fut d’ailleurs interdit à Paris. La cathédrale fut ensuite transformée en entrepôt.

Restauration du XIXe siècle

La cathédrale fut ensuite rendue au culte (définitivement le 18 avril 1802, peu après la signature du concordat de 1801). On procéda rapidement à quelques réfections d'urgence si bien qu'en décembre 1804, Napoléon Bonaparte put s’y faire sacrer empereur des Français, en présence du pape Pie VII. L’édifice avait été blanchi à la chaux pour la circonstance, puis dissimulé sous des décors de Percier et Fontaine.

Une fois la paix retrouvée, la cathédrale était dans un tel état de délabrement que les responsables de la ville commencèrent à envisager la possibilité de l’abattre totalement. Le grand romancier Victor Hugo, admirateur de l’édifice, écrivit alors son roman Notre-Dame de Paris (publié en 1831) qui eut un énorme succès et avait notamment pour but de sensibiliser le public à la valeur d’un tel monument, d'autant plus que l'année de la publication de son roman des émeutiers anti-légitimistes pillèrent la sacristie et son trésor, brisèrent les vitraux et dévastèrent l'archevêché. Il réussit à créer un large mouvement populaire d’intérêt en faveur de la cathédrale. Son roman avait rendu vie à un monument alors marginalisé et l’avait rendu plus familier aux Parisiens. À cela s’ajoutait le poids du nouveau courant européen appelé romantisme qui s’efforçait de donner aux hommes une nouvelle conception du monde. Par son roman, Victor Hugo contribua largement à sauver le chef-d’œuvre meurtri d’un destin fatal.



Le sort de Notre-Dame focalisa différents courants de pensée : les catholiques bien sûr qui désiraient réconcilier la France avec la piété et la foi d’antan, les monarchistes aussi qui s’efforçaient de renouer avec un proche passé, mais aussi le courant laïc.

Le ministre des Cultes de l’époque décida d’un grand programme de restauration. L’architecte Godde chargé jusqu’alors de l’entretien de l’édifice et dont les méthodes de restauration faisaient l’unanimité contre elles fut écarté. On se tourna vers Jean-Baptiste Antoine Lassus et Eugène Viollet-le-Duc qui s’étaient distingués sur le chantier de la Sainte-Chapelle. Ces derniers déposèrent un projet et un rapport, et ayant emporté l’appel d'offres en 1844, présentèrent en 1845 un budget de 3 888 500 francs, qu’ils durent réduire à 2 650 000, pour la réfection de la cathédrale et la construction d’une sacristie. L'Assemblée nationale vota une loi accordant cette somme, et c’est ainsi qu’après de longues années d’attente, la restauration put vraiment débuter. Le maigre budget fut épuisé en 1850. Les travaux s’arrêtèrent. Viollet-le-Duc dut présenter à plusieurs reprises de nouvelles propositions afin que les travaux pussent se terminer. Au total plus de douze millions de francs furent ainsi octroyés. Lassus étant décédé en 1857, c’est lui seul qui termina la restauration le 31 mai 1864.

La construction de la sacristie se révéla un gouffre financier. Il fallut en effet descendre à neuf mètres avant de rencontrer un terrain stable. Des maîtres-verriers pastichèrent des vitraux du xiiie siècle en réalisant les verrières des fenêtres hautes du chœur ou des baies des chapelles, tels Antoine Lusson ou Adolphe Napoléon Didron.

L’état lamentable des maçonneries de la cathédrale était généralisé, la porte rouge par exemple était en ruine. On ne comptait plus les pinacles brisés, les gables effondrés. Quant à la grande statuaire des portails et de la façade, il n’en restait plus grand-chose. Les restaurateurs durent effectuer un profond travail de recherche afin de restituer (à l’identique si possible, ce qui l’était rarement à l'époque) les parties dégradées, ce dont témoignent les écrits et dessins de Viollet-le-Duc.

C’est la restitution du programme sculpté de la cathédrale qui constitue la principale réussite des deux architectes. Ils ont d’emblée voulu reconstituer toute l’ornementation sculpturale détruite, en s’inspirant ou copiant des œuvres de la même époque et restées intactes (Amiens, Chartres et Reims). Pour ce faire les architectes réunirent une équipe d’excellents sculpteurs sous la direction d’Adolphe-Victor Geoffroy-Dechaume. Beaucoup d’entre eux provenaient de l’atelier de David d’Angers et se connaissaient. Plus de cent grandes statues furent ainsi créées à destination de l’extérieur, dont les douze statues en cuivre entourant la base de la flèche, œuvres de Geoffroi-Dechaume lui-même, qui témoignent du grand talent de ce sculpteur. Viollet-le-Duc apporta un très grand soin à la réalisation de ces statues. Elles étaient d’abord dessinées par ses soins, puis une maquette grandeur nature en plâtre était réalisée. On apportait alors les corrections nécessaires, jusqu’à ce que l’œuvre fût jugée satisfaisante. À ce moment seulement, on procédait à la réalisation de la statue définitive en pierre. Aucune liberté de création n’était laissée aux sculpteurs, dont le travail était totalement contrôlé par les architectes.

Lors de la restauration, la cathédrale fut quelque peu remaniée. La rosace sud, par exemple, fut pivotée de quinze degrés afin de la faire reposer selon un axe vertical, modification qui, parfois critiquée, était motivée par la nécessité de consolider l’ensemble, dont la maçonnerie s’était affaissée. Enfin quelques statues sorties de l’imagination de l’architecte furent édifiées, telles les impressionnantes chimères contemplant Paris du haut de la façade. Le parvis de Notre-Dame est dégagé dans les années 1860-1870 par des travaux voulus par le baron Haussmann lors des transformations de Paris sous le Second Empire, les préoccupations hygiénistes d'Haussmann se conjuguant avec une nouvelle conception artistique qui isole la cathédrale sur une place et dégage des perspectives. Ces travaux nécessitent la démolition de l'ancien Hospice des Enfants-trouvés du XVIIIe siècle, devenu siège de l’administration de l'Assistance-publique, et de l'ancien Hôtel-Dieu. Après la construction de la crypte archéologique, les contours des rues médiévales et d’anciens bâtiments, comme l'église Sainte-Geneviève-des-Ardents, disparue en 1747, ont été matérialisés sur le sol du parvis par des pavés de couleurs claires.

Depuis la restauration du XIXe siècle

Peu de temps après, pendant la Commune de 1871, des émeutiers mirent le feu à quelques bancs et chaises, mais l’incendie fut vite maîtrisé et ne causa que des dégâts très légers.



La cathédrale passa les deux guerres mondiales sans problème notable. En 1965, les douze fenêtres hautes de la nef et les douze petites rosaces à alvéoles des tribunes furent garnies de 24 vitraux colorés remplaçant les verres gris et ternes implantés par les chanoines au XVIIIe siècle. Non figuratifs, ils furent l’œuvre du peintre-verrier Jacques Le Chevallier qui utilisa les produits et couleurs du Moyen Âge. L’ensemble utilisait une quinzaine de tons, à dominante rouge et bleue (la graduation allant d’ouest en est du bleu vers le rouge). Le 3 octobre 1972, lors d'un rassemblement de soutien aux militants du Front de libération de la Bretagne, des autonomistes bretons parviennent à accrocher un Gwenn ha Du au sommet de la flèche de la cathédrale, nécessitant l'envoi d'un hélicoptère pour le décrocher par la suite.

Dans les années 1990, les procédés modernes ont permis de redonner à la pierre extérieure de la cathédrale noircie par les siècles, sa pureté et une blancheur supposée d’origine. On distinguait deux couches distinctes de pollution qui noircissait la pierre :

La crasse, représentant un danger pour la pierre, a été éliminée. Les sculptures ont été traitées par laser, micro-gommage et compresses humides afin de pulvériser la poussière sans altérer la patine du temps. Les pierres trop détériorées ont été remplacées par d’autres, identiques, prélevées en région parisienne dans des gisements de calcaire lutétien coquiller semblable. De plus, un réseau de fils électriques, invisibles depuis le sol, a entraîné le départ des pigeons responsables d’altérations importantes au niveau des pierres.

À l'occasion du jubilé du 850e anniversaire de la cathédrale, des travaux d'envergure sont menés dans la cathédrale pour marquer son entrée dans le XXIe siècle. Les éclairages de la nef sont restaurés largement, permettant de créer des ambiances propres aux visites, aux messes et aux concerts en soirée. Le grand orgue voit dans une première phase sa console totalement informatisée en 2013. Dans un deuxième temps, en 2014, ses 12 000 tuyaux sont tous nettoyés. Un système de prévention des incendies est mis en place, avec de nouvelles serrures aux portes et un câblage spécifique installés. Les fils traînant ici ou là à l'intérieur et à l'extérieur sont également masqués en grande partie pour permettre une meilleure unité architecturale. Enfin, les tours de Notre-Dame sont garnies de neuf nouvelles cloches, dont un bourdon, qui sonnèrent pour la première fois le 23 mars 2013. Elles donnent ainsi un nouvel ensemble campanaire semblable à celui existant au Moyen Âge.

De novembre 2012 à décembre 2013, une structure provisoire de type beffroi, le « Chemin du jubilé » est installé sur le parvis, suivant l'ancienne rue Neuve Notre-Dame et débouchant sur un belvédère et un gradin de 600 places donnant une vue inédite de la façade de la cathédrale. Elle est garnie des prénoms des employés de la cathédrale et des saints de la liturgie chrétienne.

La pollution génère des dommages importants (chute de gargouilles, ruine de pinacles…) qui conduisent en 2017 l'archevêché à lancer un appel à des dons pour un montant espéré de 100 millions d'euros sur 20 ans afin de réparer la flèche dont il faut refaire l'étanchéité (10 millions d'euros de travaux), pour la sacristie située tout à côté de la cathédrale (10 millions), consolider les arcs-boutants du chevet (20 à 30 millions).

La restauration de la cathédrale dans les années 1990 n'avait concerné que la façade occidentale. Un programme global de restauration d'une durée de dix ans et dont le coût est estimé à 60 millions d'euros (40 millions de l'État et 20 millions du mécénat) débute, le 11 avril 2019, par la dépose des seize statues, préalable aux travaux de restauration de la flèche prévus pour durer trois ans pour un coût de 11 millions d'euros. La maîtrise d'ouvrage de l'opération est confiée au service de la Conservation régionale des monuments historiques au sein de la Direction régionale des Affaires culturelles d'Île-de-France et la maîtrise d'œuvre à l'architecte en chef des monuments historiques, Philippe Villeneuve. Auparavant, une convention-cadre de mécénat est conclue, le 25 septembre 2018, entre l'État, la Fondation Notre-Dame, l'organisme américain de type 501c3 Friends of Notre-Dame de Paris et la Fondation Avenir du patrimoine à Paris afin d'accélérer le rythme des travaux. Les financement privés sont centralisés par la FAPP et l'État s'engage, dans la limite de 4 millions par an, à augmenter sa subvention annuelle d'un euro supplémentaire pour chaque euro récolté par le mécénat privé.

Le 11 avril 2019, les 16 statues monumentales de Viollet-le-Duc qui entouraient la flèche sont déposées, à grand renfort de levage, en vue de leur réhabilitation. Elles échappent ainsi aux dommages de l'incendie du 15 avril 2019.

Incendie du 15 avril 2019


Dans la soirée du 15 avril 2019, un grave incendie se déclare. Le sinistre détruit la toiture de la cathédrale et sa charpente du XIIIe siècle, la flèche de Viollet-le-Duc, et plusieurs voûtes formant le plafond (celle de la croisée du transept, celle du transept nord, et une travée de la nef). Le jour même, le président de la République, Emmanuel Macron, annonce que la cathédrale sera reconstruite et le lendemain, lors d'une allocution télévisée spéciale, il déclare : « Nous rebâtirons la cathédrale plus belle encore, et je veux que cela soit achevé d'ici cinq années ». Le jour suivant, le Premier ministre, Édouard Philippe, annonce qu'un concours international d'architecture va être lancé pour reconstruire la flèche de la cathédrale.

Le 29 juillet 2019, l’association Robin des Bois porte plainte contre X après la publication d’une enquête de Mediapart révélant une pollution au plomb à l’intérieur et autour de la cathédrale.


Egger Ph.